Vers un diagnostic précoce de maladies graves à l’aide de biomarqueurs peptidiques

Résultats scientifiques

Les peptides sont des biomarqueurs de choix pour le diagnostic de maladies graves à partir de biofluides, mais les techniques actuelles pour doser ces biomarqueurs sont longues, coûteuses et pas assez sensibles. Dans une étude parue dans ACS Central Science, des scientifiques démontrent la possibilité d’identifier de manière unique les biomarqueurs peptidiques de la coagulation grâce à leur signature électrique à travers un nanopore.

La détection précoce de maladies graves à des fins de prévention est, avec la gestion personnalisée des traitements, un des défis majeurs en matière de santé. Le développement de nouveaux tests analytiques très sensibles est nécessaire pour la détection directe de biomarqueurs à partir de biofluides. Par exemple, les troubles de la coagulation associés à un accident vasculaire cérébral, une crise cardiaque ou un cancer peuvent être reliés à l’évolution de biomarqueurs, en particulier, au biomarqueur fibrinopeptide A (FPA). Ce biomarqueur est une protéine qui existe sous plusieurs formes appelées variants. Les dosages actuels ne parviennent pas à discriminer entre ces variants et le FPA est donc sous-exploité comme biomarqueur pour la pratique clinique de routine.

Dans ce contexte, des scientifiques du Laboratoire analyse, modélisation et matériaux pour la biologie, et l'environnement (LAMBE, CNRS/Université Paris-Saclay-Evry/CYU Cergy) et du Centre de ressources biologiques Lariboisière (CRB/Hôpital Lariboisière), en collaboration avec la start-up Dreampore, ont utilisé la détection électrique à travers un nanopore (10-9 m) pour identifier le FPA et ses variants, le FPA phosphorylé et deux autres dérivés. Cette technique d’analyse permet de détecter et d’identifier une seule espèce dans le nanopore à l’aide d’une mesure électrique. Par application d’une différence de potentiel entre deux compartiments remplis d’une solution ionique et séparés par une membrane percée d’un nanotrou, on peut mesurer un courant ionique. Quand une espèce entre dans le nanopore, elle bloque partiellement les ions et entraîne une chute de courant en fonction de sa nature chimique, de sa conformation et de sa taille.

L’étude parue dans ACS Central Science montre que cette technique permet de caractériser chaque variant du peptide FPA par un signal électrique unique. Les scientifiques ont également montré que la forme phosphorylée de FPA, un de ces variants, pouvait adopter deux conformations différentes, chacune ayant des réponses électriques différentes. Cette technique permet donc de discriminer simplement entre chaque variant dans un mélange, ouvrant la voie au développement de nouveaux tests de diagnostiques portables sensibles.

Rédacteur: AVR

Le FPA existe sous plusieurs formes dans le sang, non phosphorylé (rouge), phosphorylé (bleu), et sous la forme d'une série de peptides issus de clivages séquentiels (jaune et vert). La signature électrique des biomarqueurs à travers un nano pore, en particulier le taux de blocage de courant et le temps de résidence dans le nano pore, permet de discriminer entre ces variants et les doser simplement. © Juan Pelta.

Référence

Nanopore Discrimination of Coagulation Biomarker Derivatives and Characterization of a Post-Translational Modification.
Aïcha Stierlen, Sandra J. Greive, Laurent Bacri, Philippe Manivet, Benjamin Cressiot & Juan Pelta
ACS Central Science 2023.

https://pubs.acs.org/doi/full/10.1021/acscentsci.2c01256

Contact

Juan Pelta
Enseignant-chercheur au Laboratoire analyse, modélisation et matériaux pour la biologie, et l'environnement (LAMBE, CNRS/Université Paris-Saclay-Evry/CYU Cergy)
Benjamin Cressiot
Enseignant chercheur au Laboratoire analyse, modélisation et matériaux pour la biologie, et l'environnement (LAMBE, CNRS/Université Paris-Saclay-Evry/CYU Cergy)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS