Une voie d’accès inédite à des peptides stables en milieu biologique

Résultats scientifiques Vivant et santé Molécules

C'est une avancée notable dans la chimie des sucres. Les chimistes du laboratoire de Biomolécule-Conception, Isolement et Synthèse (CNRS/Université Paris-Sud) et du Centre de Biophysique Moléculaire (CNRS), ont mis au point une méthode simple et originale pour synthétiser des peptides thioglycosylés. Ces conjugués d’un peptide et d’un sucre dont l'oxygène est remplacé par un soufre sont très stables dans un milieu biologique. Ces travaux, publiés dans la revue Chemical Science, ouvrent de multiples applications en thérapie et en recherche.

Les glycopeptides et les glycoprotéines sont des conjugués composés d’un sucre lié à une chaîne d’acides aminés (peptide) ou à une protéine. Ils constituent l’architecture moléculaire de nombreuses biomolécules et ils sont largement présents dans tous les organismes vivants. Cette omniprésence les rend indispensables notamment en médecine mais la liaison du sucre au peptide/protéine peut se faire dégrader par les enzymes présentes dans le vivant. Pour suivre un glycoconjugé particulier ou pour délivrer un glycoconjugé à usage médical, il faut donc le rendre inattaquable par ces enzymes.  Ce que des chimistes du laboratoire de Biomolécule-Conception, Isolement et Synthèse (CNRS/Université Paris-Sud) et du Centre de Biophysique Moléculaire (CNRS) viennent de réaliser avec une méthode plus simple qu’auparavant.

Une technique classique pour rendre les conjugués stables est de remplacer l’oxygène qui lie la partie sucre au peptide/protéine par un atome de soufre. L’analogue ainsi formé est appelé un thioglycoconjugé (thio- pour soufre) et c’est un excellent mime des glycoconjugés, tout en restant stable. Problème : la transformation pour l’obtenir nécessite de nombreuses étapes de synthèse, notamment des étapes complexes de protection et déprotection des différentes fonctions des molécules à conjuguer.

En une seule étape, dans de l’eau à pH neutre et à température ambiante, l’équipe de parisiens et d’orléanais fait bien mieux que la méthode classique. En utilisant de acides aminés possédant un noyau aromatique iodé comme point d’ancrage, en présence d’un catalyseur au palladium, ils obtiennent des thioglycoaminoacides, « briques moléculaires » des peptides complexes. Au final, cette méthode a pu être utilisée pour synthétiser un long thioglycopeptide de 60 acides aminés. Cette facilité d’accès ouvre la voie à une multitude de nouvelles molécules inédites, capables de mimer les glycoprotéines impliquées dans diverses pathologies.

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© Samir Messaoudi

 

Référence

David Montoir, Mehdi Amoura, Zine El Abidine Ababsa, T. M. Vishwanatha, Expédite Yen-Pon,
Vincent Robert, Massimiliano Beltramo, Véronique Piller, Mouad Alami, Vincent Aucagne et Samir Messaoudi
Synthesis of Aryl-Thioglycopeptides Through Chemoselective Pd-Mediated Conjugation
Chemical ScienceSeptembre 2018
DOI : 10.1039/C8SC02370K

Contact

Samir Messaoudi
Synthèse organométallique, hétérochimie, chimie médicinale
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC