Quantifier l’acidité des milieux réactionnels fluorés pour favoriser de nouvelles réactions

Résultats scientifiques

La grande majorité des dérivés fluorés utilisés en pharmacologie ou en agrochimie sont obtenus à partir de fluorure d’hydrogène (HF) dont la réactivité peut être contrôlée par l’acidité du milieu réactionnel. Des scientifiques du CNRS proposent d’utiliser la RMN pour évaluer précisément cette acidité encore mal connue, paramètre clé dans la sélectivité des réactions de fluoration menant aux dérivés fluorés souhaités.

Présent dans de nombreux produits pharmaceutiques et agrochimiques, le fluor occupe une place de choix en synthèse organique. Parmi ces produits, les composés polyfluorés (PFAS), substances nocives, toxiques et persistantes dans l’environnement, sont en passe d’être interdites dans l’union européenne. Pas étonnant que l’industrie chimique cherche activement des méthodes alternatives efficaces, simples et non polluantes, pour préparer de nouveaux composés fluorés biodégradables pour remplacer les PFAS.

La grande majorité de ces dérivés fluorés sont préparés à partir d’une source unique de fluor, le fluorure d’hydrogène (HF), source primaire de fluor peu coûteuse. En jouant sur l’acidité du milieu réactionnel par ajout de bases organiques, on modifie la réactivité de HF et on oriente ainsi les synthèses vers le dérivé fluoré souhaité ou vers de nouveaux composés. Pour envisager de nouvelles réactions de fluoration sélectives et efficaces menant à des composés fluorés plus vertueux, on doit donc commencer impérativement par contrôler l’acidité des milieux HF/base. Mais de façon surprenante, aucun protocole de mesure n'a été rapporté pour évaluer ces propriétés acides.

Les scientifiques de l’Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers (CNRS/Université de Poitiers) proposent d’utiliser la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (RMN) de l’isotope du fluor 19F qui permet de quantifier avec précision l’acidité de ces milieux HF/base. Cette méthode repose sur la synthèse et l’utilisation de sondes organiques spécifiques dont les propriétés acido-basiques déterminées en amont par des calculs DFT servent de référence.

Cette méthode, d’abord testée avec succès sur des réactifs HF/base commerciaux, a ensuite été appliquée à un ensemble de réactifs HF/base courants dont les acidités étaient encore inconnues. Ces mesures devraient permettre de mieux comprendre le rôle crucial de l’acidité sur l'efficacité et la sélectivité des réactions dans ces conditions. Une étude, parue dans le Journal of the American Chemical Society qui pourrait être étendue à d’autres milieux réactionnels acides d’intérêt.

 

Rédacteur : CCdM

Référence

Mélissa Longuet, Kassandra Vitse, Agnès Martin-Mingot, Bastien Michelet, Frédéric Guégan & Sébastien Thibaudeau

Determination of the Hammett acidity of HF/base reagents

Journal of the American Chemical Society 2024

https://pubs.acs.org/doi/10.1021/jacs.4c02344

© Sébastien Thibaudeau

Contact

Sébastien Thibaudeau
Enseignant-chercheur à l’Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers (CNRS/Université de Poitiers)
Communication CNRS Chimie