Plus de défauts pour plus de luminescences

Résultats scientifiques

La luminescence du YAG couramment utilisé dans les lasers ou pour l’éclairage LED dépend du taux de défauts dans sa structure cristalline. Par cristallisation du liquide fondu à haute température, des scientifiques du laboratoire « Conditions extrêmes et matériaux : haute température et irradiation » (CNRS) sont parvenus à accéder à de nouvelles structures présentant un nombre de défauts bien supérieur à toutes celles obtenues jusqu’ici et qui permettent d’envisager leur utilisation dans des systèmes optiques de très forte puissance.

Le YAG, oxyde très connu d’Aluminium et d’Yttrium et de formule Y3Al5O12, est un solide cristallin luminescent qui présente un rendement quantique très élevé, c’est-à-dire une forte intensité lumineuse émise par nombre de photons (UV) reçus lors de l’excitation. Couramment exploitée dans les lasers et de nombreuses LED, cette luminescence dépend très fortement de la structure cristalline du YAG et surtout du nombre de défauts qu’elle présente. Composé très stable, il est hélas très difficile d’en modifier sa composition chimique et donc de moduler ses défauts.

La structure de ce matériau est simple : les atomes d’yttrium occupent des sites de coordinence 8 (ils s’entourent de 8 atomes d’oxygène) et les atomes d’aluminium occupent des sites tétraédriques (60% d’atomes d’aluminium entourés par 4 oxygènes) et octaédriques (40% entourés par 6 oxygènes). Pour modifier cette structure et moduler ainsi les propriétés de luminescence, on a longtemps envisagé d’induire des défauts en permutant les atomes d’aluminium et d’yttrium sur les différents sites cristallographiques. Mais, vu la stabilité du composé, seules de petites modifications ont pu être apportées, comme l’occupation d’un infime partie des sites cristallographiques de l’aluminium par de l’yttrium.

Les scientifiques du laboratoire « Conditions extrêmes et matériaux : haute température et irradiation » (CNRS), spécialisés dans la synthèse de nouveaux matériaux hors-équilibre thermodynamique, sont parvenus à stabiliser de nouvelles phases cristallines du YAG. Par cristallisation du liquide fondu à haute température, ils ont obtenu des composés avec une substitution au moins dix fois plus importante d’atomes d’Al par l’Y ! En utilisant la diffraction des rayons X, la microscopie électronique à transmission, la RMN du solide et l’EXAFS, ils ont montré que les atomes d’yttrium en excès se localisaient sur les sites octaédriques précédemment occupés par l’aluminium et que les modifications structurales induites par cette substitution permettaient alors de moduler les propriétés optiques du YAG. Ces résultats, parus dans la revue Advanced Functional Materials, permettent d’envisager de nouvelles gammes de longueur d’onde d’émission qui restaient jusqu’à maintenant inaccessibles.

Rédacteur : CCdM

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© Mathieu Allix

Référence

Weiwei Cao, Ana Isabel Becerro, Victor Castaing, Xue Fang, Pierre Florian, Franck Fayon, Didier Zanghi, Emmanuel Veron, Alessio Zandonà, Cécile Genevois, Michael J. Pitcher & Mathieu Allix
Highly Nonstoichiometric YAG Ceramics with Modified Luminescence Properties
Advanced Functional Materials 2023

https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/adfm.202213418

Contact

Mathieu Allix
Chercheur au au laboratoire Conditions extrêmes et matériaux : haute température et irradiation (CNRS)
Michael Pitcher
Chercheur au laboratoire Conditions extrêmes et matériaux : haute température et irradiation (CNRS)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC