Nouveaux matériaux hybrides pour des mémoires durables

Résultats scientifiques

Une vitesse d'accès rapide, un stockage de haute densité pour une durée infinie, des performances essentielles pour les futures mémoires numériques que des matériaux à changement de phase pourraient bien permettre d’atteindre : c’est ce que proposent des scientifiques de l’Institut de recherche sur la catalyse et l’environnement de Lyon (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1) en utilisant une nouvelle génération de mémoires à base de matériaux hybrides qui dépassent, en terme de puissance, de densité et de durée de conservation des données, les capacités des chalcogénures, composés les plus en vogue actuellement.

Chaque jour, nous générons 2,5 quintillions (2,5 1030) octets de données, et 90 % des données actuellement stockées ont été produites au cours des deux dernières années. Pour répondre à cette augmentation de nos besoins, il devient urgent d’améliorer les performances des mémoires actuelles en terme de rapidité d'accès, de densité de stockage à haute, et de durée de conservation.

Depuis une dizaine d’années, les recherches s’orientent vers des matériaux à changement de phase (PCM), notamment les chalcogénures, comme le Ge2Sb2Te5 et ses dérivés, pressentis pour alimenter les mémoires PCRAM (Phase-Change Random Access Memory) de demain. En variant la température, ils peuvent en effet passer d’une phase cristalline présentant une faible résistivité (1/ Etat ON) et une phase amorphe de forte résistivité (0/ Etat OFF). La lecture optique des états 0/1 permet donc d’envisager leur utilisation pour le stockage d’une information binaire.

Hélas, ces matériaux présentent plusieurs inconvénients intrinsèques limitant encore leur utilisation dans des dispositifs de stockage : (i) pour certains, une température trop élevée (autour de 600 °C) pour provoquer le changement de phase, (ii) une taille du domaine du changement de phase difficile à contrôler et (iii) une mise en forme limitée due à leur friabilité.

Pour s’affranchir de ces difficultés, les scientifiques de l’Institut de recherche sur la catalyse et l’environnement de Lyon (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1) proposent une nouvelle famille de matériaux hybrides mous à base de polymères de coordination appelés thiolates d’or. Ces matériaux formés de métaux liés entre eux par des molécules organiques présentent un changement de phase à l’état solide d’amorphe à cristallin dans des conditions douces de chauffage (< 200°C). La phase cristalline présente une émission de lumière dans le rouge lorsqu’elle est éclairée dans l’ultra-violet (1/ON), alors que sa phase amorphe n’en présente aucune (0/OFF).

Ces thiolates d’or, présentés dans la revue Angew. Chem. Int. Ed., représentent donc une nouvelle génération de mémoires permanentes à base de composés durables qui pourrait dépasser les capacités des chalcogénures avec une mise en forme facilitée.

Rédacteur : CCdM

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© Aude Demessence

Référence

O. Veselska, S. Vaidya, C. Das, N. Guillou, P. Bordet, A. Fateeva, F. Toche, R. Chiriac, G. Ledoux, S. Wuttke, S. Horike & A. Demessence
Cyclic solid-state multiple phase changes with tuned photoemission in a gold thiolate coordination polymer
Angew. Chem. Int. Ed. 2022

https://doi.org/10.1002/anie.202117261

Contact

Aude Demessence
Chercheuse à l'Institut de recherches sur la catalyse et l’environnement
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC