MOFs pour l’environnement et l’énergie : des matériaux poreux sur mesure

Résultats scientifiques

Avec près de 1000 m2 de surface spécifique par gramme, les “metal organic framework” (MOF) sont des matériaux ultraporeux très convoités pour la catalyse ou le stockage de gaz. Cependant, pour les processus dynamiques en phase liquide, l'accessibilité des micropores où se trouvent les sites actifs est parfois compliquée. Pour résoudre ce problème, une équipe de chimistes autrichiens, français et israéliens propose d’introduire de mésopores plus grands par traitement thermique de MOFs partiellement thermosensibles. Récemment présentés dans la revue Nature Communications, ces matériaux sont dotés de propriétés exceptionnelles, notamment pour la production d’hydrogène via la photocatalyse de solution de méthanol aqueuse.

Les “metal organic framework” (MOFs) suscitent un grand intérêt comme classe innovante de matériaux fonctionnels en raison de leur structure : des clusters métalliques catalytiquement actifs liés par des ligands organiques fonctionnels dans des structures cristallines ultraporeuses ordonnées. Cependant, les pores sont parfois si petits qu’ils limitent la diffusion des réactifs à travers les MOF et imposent un sérieux défi pour leur utilisation efficace en tant que catalyseurs, en particulier dans les milieux réactionnels liquides.

Pour contourner ce problème, des chimistes de l’Institut de chimie des matériaux de l’Université technique de Vienne en Autriche, en collaboration avec des chimistes du Laboratoire de catalyse et spectrochimie (CNRS/Ecole nationale supérieure d’ingénieurs de Caen/Université de Caen Normandie) et des chimistes israéliens, proposent une stratégie innovante qui consiste à introduire des mésopores dans des MOF synthétisés à partir de deux ligands organiques distincts, l’un étant thermosensible. L’élimination sélective post-synthèse de ce dernier par thermolyse permet en effet d’introduire un second niveau de porosité, plus grand, sans altérer l’intégrité du matériau poreux d’origine. Grâce à cette approche, ils ont conçu des MOF photo-actifs avec deux architectures poreuses hiérarchiques distinctes ressemblant soit à de grandes cavités, soit à de petites “fractures” ramifiées. Cette architecture de pores est directement modulable par la phase d'élimination du ligand. Les deux géométries de pores ainsi générées, étudiées en détails grâce à des méthodologies combinant des mesures précises et une utilisation avancée des méthodes d’analyse, ont permis de considérablement améliorer l’efficacité de ces matériaux en tant que photocatalyseurs pour les réactions d’évolution de l’hydrogène (jusqu’à 500% pour la structure dite « fracturée »). Cette étude, à retrouver dans Nature Communications, offre une nouvelle stratégie d'ingénierie ciblée du réseau poreux des MOF qui devrait permettre leur utilisation dans les technologies environnementales et énergétiques.

Rédacteur: AVR

Caractérisation des mésopores obtenus par traitement thermique à 300 °C pour 1, 5 et 20 heures de deux MOFs obtenus avec des ratios de ligands différents et qui conduisent à deux architectures de mésopores différentes: des cavités (en haut) et petites fractures ramifiées (en bas). © Shaghayegh Naghdi et al.

Référence

Selective ligand removal to improve accessibility of active sites in hierarchical MOFs for heterogeneous photocatalysis

Shaghayegh Naghdi, Alexey Cherevan, Ariane Giesriegl, Rémy Guillet-Nicolas, Santu Biswas, Tushar Gupta, Jia Wang, Thomas Haunold, Bernhard Christian. Bayer-Skoff, Günther Rupprechter, Maytal Caspary Toroker, Freddy Kleitz et Dominik Eder Nature Communications 12 janvier 2022.

doi: 10.1038/s41467-021-27775-7

 

Contact

Rémy Guillet-Nicolas
Chercheur au Laboratoire de catalyse et spectrochimie (CNRS/ENSICAEN/Normandie Université )
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS