La palette de semi-conducteurs 2D pour l’(opto)électronique s’agrandit

Résultats scientifiques

Des scientifiques du Laboratoire de nanochimie de l’Institut de science et d’ingénierie supramoléculaires (CNRS/Université de Strasbourg), en collaboration avec l’Université technique de Dresde (Allemagne), ont mis au point une méthode de production de phosphore violet, semi-conducteur 2D de grande qualité pour des applications en (opto)électronique. Ces résultats sont publiés dans la revue Journal of the American Chemical Society.

Les matériaux 2D ont attiré beaucoup l’attention en raison de leurs propriétés électriques et optiques fascinantes, permettant une large gamme d’applications de haute performance en nanoélectronique, en optoélectronique, en spintronique, etc. De nouvelles caractéristiques inédites résultent de l’assemblage de jonctions P-N basées sur l’intégration de semi-conducteurs 2D de type P et de type N adaptés. Le premier, de type P, peut conduire des trous (charges positives), alors que le second, de type N, conduit des électrons (charges négatives). Néanmoins, l’essentiel des semi-conducteurs 2D connus est de type N et les semi-conducteurs de type P découverts à ce jour restent rares, ce qui limite sévèrement le degré de liberté des jonctions P-N. Il est donc crucial de découvrir de nouveaux semi-conducteurs 2D de type P afin de stimuler le développement de nouvelles architectures pour les technologies (opto)électroniques complémentaires à haut rendement énergétique de la prochaine génération.

Dans ce contexte, le phosphore violet (PV), forme stable du phosphore, est un des candidats les plus prometteurs pour changer la donne dans la famille des semi-conducteurs 2D de type P, en grande partie grâce à sa stabilité supérieure à celle du phosphore noir, lui aussi semi-conducteur de type P. Cependant, la production de feuilles ultrafines de PV de haute qualité*, nécessaire pour leur insertion dans des jonctions P-N, reste difficile, ce qui limite encore son utilisation dans des dispositifs (opto)électroniques.

Des scientifiques du Laboratoire de nanochimie de l’Institut de science et d’ingénierie supramoléculaires (CNRS/Université de Strasbourg), en collaboration avec l’Université technique de Dresde (Allemagne), ont développé une nouvelle stratégie de synthèse pour produire des feuillets de PV de haute qualité de quelques monocouches d’épaisseur. Après avoir fait croître des cristaux de PV de taille centimétrique, ils ont réalisé une sonication** douce en phase liquide pour « décoller » des nanofeuilles de PV ultra-purs, de grande dimension (jusqu’à 2 μm2) et de faible épaisseur (jusqu’à la monocouche). Différents dispositifs en couches minces tels que des transistors à effet de champ, des photodétecteurs et des circuits logiques CMOS (« complementary metal oxide semiconductor ») présentant d’excellentes performances électriques et optiques ont ainsi pu être réalisés. Résultats qui montrent que le phosphore violet n’a pas fini de faire parler de lui...

(*) Moins le matériau est épais, meilleure est la mobilité des charges. D’où de meilleures performances électriques et optiques.

(**) Exposition aux ultrasons dont la fréquence élevée est supérieure à 20 kHz.

samori image
© Paolo Samorì

Référence

Antonio Gaetano Ricciardulli, Ye Wang, Sheng Yang & Paolo Samorì
Two-Dimensional Violet Phosphorus: A p-Type Semiconductor for (Opto)electronics

J. Am. Chem. Soc. 2022, 144, 3660−3666

https://doi.org/10.1021/jacs.1c12931

Contact

Paolo Samori
Enseignant chercheur à l'Institut de science et d’ingénierie supramoléculaires
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC