La dynamique interne des batteries lithium-ion révélée par des méthodes acoustiques et structurales

Résultats scientifiques

Pour mieux comprendre les phénomènes internes au sein des batteries lithium-ion en fonctionnement, une équipe de scientifiques propose de combiner des mesures ultrasonores à des analyses par rayons X et nanodilatométrie. Cette approche multimodale leur a permis de relier précisément les signaux acoustiques aux transitions mécaniques et électrochimiques des électrodes pendant leurs cycles de charge-décharge.

Les batteries lithium-ion dominent aujourd’hui le marché du stockage de l’énergie mais présentent encore des limitations : coût élevé, densité énergétique limitée et risques de sécurité (comme l’emballement thermique). La surveillance des processus électrochimiques y compris ceux liées à l’aspect mécanique (gonflement des matériaux) mis en jeu au cours des cycles de charge-décharge des batteries est donc essentielle pour prévenir ces défaillances.

Les techniques de caractérisation à base d’ultrasons sont de plus en plus couramment utilisées pour étudier la dynamique interne des batteries. Ces ondes qui se propagent à travers les matériaux, électrode positive et négative, sont partiellement absorbées ou transmises en fonction des propriétés intrinsèques du matériau. Il est ainsi possible de mettre en évidence des changements de densité, l’apparition de défauts, et de visualiser les phénomènes de gonflement liés à la réaction des ions lithium au cours des cycles de charge-décharge. Cependant, les études actuelles n’établissent que des corrélations superficielles entre les paramètres ultrasonores et électrochimiques, limitant ainsi la compréhension de l’origine des variations de signal pendant les cycles. 

Des scientifiques du Laboratoire d'électrochimie et physico-chimie des matériaux et interfaces (CNRS/Université Grenoble-Alpes/Grenoble INP)1  proposent pour la première fois de coupler ces mesures ultrasonores operando à des mesures de diffraction des rayons X utilisant le rayonnement synchrotron et de nanodilatométrie. Dans une cellule éléctrochimique constituée d’une électrode positive à base oxyde métallique LiNi₀.₈Mn₀.₁Co₀.₁O₂ et d’une électrode négative en graphite, ils ont suivi de manière non invasive l’évolution des signaux ultrasonores au cours des cycles de charge/décharge tout en collectant les évolutions structurales des matériaux d’électrodes. Le couplage des différentes techniques leur a permis ensuite de relier leurs observations aux processus électrochimiques mis en jeu. 

Ils montrent qu'à des états de charge de la batterie compris entre 10 % et 80 %, les signaux ultrasonores reflètent principalement les évolutions de l'électrode de graphite, en particulier de son module d'élasticité pendant qu’elle intercale des ions lithium. Lorsque l'état de charge de la batterie est compris entre 80 % et 100 %, c’est une transition de phase de l’électrode positive qui impacte également le signal ultrasonore. 

Cette approche multimodale montre le potentiel des ultrasons pour suivre en temps réel l’état de santé des batteries lithium-ion, en particulier grâce à leur sensibilité à la mécanique interne du graphite. Des capteurs de données acoustiques pourraient ainsi être intégrés aux systèmes de gestion de batterie commerciales pour améliorer leur sécurité et leur durabilité.

Rédacteur : CCdM

  • 1En collaboration avec des équipes de l’Institut Néel (CNRS/Grenoble INP), du laboratoire Systèmes moléculaires et nanomatériaux pour l'énergie et la santé (CEA/CNRS) et de la RWTH Aachen University (Allemagne).

Référence

Corentin Renais, Benjamin Mercier-Guyon, David Wasylowski, Morian Sonnet, Phillip Dechent, Maxime Servajon, Nils Blanc, Sandrine Lyonnard, Dirk Uwe Sauer & Claire Villevieille
Exploring Electrochemical Dynamics in Graphite||LiNi0.8Mn0.1Co0.1O2 Cells via Operando Ultrasound and Multiprobe Approaches
Nature Communications 2025
https://doi.org/10.1038/s41467-025-62935-z 

Contact

Claire Villevieille
Chercheuse au Laboratoire d'électrochimie et physico-chimie des matériaux et interfaces (CNRS/Université Grenoble-Alpes/Bordeaux INP)
Communication CNRS Chimie