La catalyse à l’ADN réussit sa première synthèse totale

Résultats scientifiques Vivant et santé

La vie lui doit tout, et pourtant l’ADN n’a pas fini de se rendre utile. Les recoins de ses longues chaînes de nucléotides fournissent en effet un environnement chimique unique. Des chercheurs de l’Institut des biomolécules Max Mousseron (CNRS/Université de Montpellier/ENSC Montpellier), du laboratoire BioCIS (CNRS/Université Paris-Sud, Université Paris-Saclay) et de l’Université Queen Mary de Londres s’en sont servi pour obtenir des réactions jusque-là seulement possibles à l’état solide. Ces travaux bio-inspirés, publiés dans Angewandte Chemie, ont abouti à la première synthèse totale d’un composé naturel avec de l’ADN comme catalyseur.

L’ARN possède des propriétés catalytiques bien connues, qui furent essentielles dès l’apparition de la vie. Mais l’ADN fonctionne-t-il lui aussi comme catalyseur ? Des chercheurs de l’Institut des Biomolécules Max Mousseron (CNRS/Université de Montpellier/ENSC Montpellier), du laboratoire Biomolécules : conception, isolement, synthèse (CNRS/Université Paris-Sud) et de l’Université Queen Mary de Londres ont étudié le comportement d’aplysinopsines en présence d’ADN. Deux de ces substances naturelles très simples, extraites de coraux et d’éponges, peuvent s’assembler en présence de lumière pour former une autre molécule naturelle à l’architecture tridimensionnelle particulièrement complexe : le dictazole B.

La réaction exige une hétérodimérisation, où deux monomères différents forment un dimère. Cela n’avait jamais été observé autrement qu’à l’état solide, jusqu’à ce que de l’ADN soit ajouté dans la solution. Il joue en effet le rôle de catalyseur. Les réactifs se logent dans ses sillons où ils sont confinés, rapprochés et préorganisés, des conditions qui favorisent la dimérisation photochimique. Si cela fonctionne a priori avec tout type d’ADN, les chercheurs ont ici utilisé de l’ADN de saumon, bon marché et facilement disponible. Outre l’intérêt synthétique, ces travaux permettront d’évaluer les propriétés biologiques du dictazole B, jusque-là disponible en trop faibles quantités pour être vraiment étudié. La catalyse à base d’ADN n’en est qu’à ses débuts : elle devrait dévoiler de nombreuses autres réactions biomimétiques.

Ce travail a été financé par l’Agence Nationale de la Recherche (D-CYSIV ; ANR-2015-CE29-0021-01) et par le LabEx LERMIT (ANR-10-LABX-0033-LERMIT).

Référence

Nicolas Duchemin, Adam Skiredj, Justine Mansot, Karine Leblanc, Jean-Jacques Vasseur, Mehdi A. Beniddir, Laurent Evanno, Erwan Poupon, Michael Smietana et Stellios Arseniyadis
DNA-templated [2+2] photocycloaddition: a straightforward entry into the aplysinopsin family of natural products
Angewandte Chemie International Edition Engl.Juillet 2018
DOI: 10.1002/anie.201806357

Contact

Michael Smietana
Institut des biomolécules Max Mousseron
Stellios Arseniyadis
Queen Mary University of London
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Sophie Félix
Chargée de communication
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC