Faire du CO2 une ressource : le cas du méthanol

Résultats scientifiques

Principal gaz à effet de serre, le CO2 pourrait-il devenir une ressource renouvelable ? C’est le défi que tentent de relever Andrei Khodakov, Sara Navarro Jaén, Robert Wojcieszak et Mirella Virginie à l’Unité de catalyse et de chimie du solide (UCCS/CNRS). Ils nous présentent ici comment convertir économiquement ce polluant en molécule à haute valeur ajoutée comme le méthanol.

Comment réduire la teneur en CO2 de l’atmosphère ?

Le CO2 ou dioxyde de carbone est actuellement le polluant le plus important et sans doute la principale cause des dérèglements climatiques. Surtout généré par la combustion de ressources fossiles et les activités industrielles, l'objectif de l’Union européenne est d’en réduire les émissions pour 2030 d'au moins 55 % par rapport au niveau de 1990.

Deux stratégies permettent de faire face à l'augmentation constante du CO2 dans l'atmosphère : le captage et le stockage du carbone (en anglais, Carbon Capture and Storage, CCS) et le captage et l'utilisation du carbone (en anglais, Carbon Capture and Utilisation, CCU). Il s’agit en gros de capter le CO2 des centrales électriques et des installations industrielles, de le concentrer, de le pressuriser et, soit de le stocker sous terre dans des formations géologiques, soit de l’utiliser directement ou après conversion chimique ou biologique en produits à haute valeur ajoutée.

Ce déchet peut-il être une ressource ?

L'utilisation directe du CO2 est possible dans de nombreuses applications industrielles, telles que la récupération assistée du pétrole ou du gaz naturel, les additifs pour boissons, les agents antibactériens et antifongiques, des réfrigérants ou solvants, dans les emballages alimentaires, extincteurs, en soudure et moulage, comme antirouille ou encore pour le traitement de l'eau. Une autre stratégie importante de valorisation du CO2 est sa transformation en produits chimiques à plus haute valeur ajoutée par des voies biologiques ou chimiques. Le dioxyde de carbone provenant de diverses sources industrielles peut être converti en biomasse à l'aide de plantes terrestres, de microbes et d'algues. La conversion chimique du CO2 débouche quant à elle sur des carburants ou des substances chimiques qui permettent d’améliorer de façon notable le bilan carbone et le bilan énergétique des technologies existantes.

Transformer le CO2 en méthanol, pourquoi ?

Une des pistes largement étudiées est la conversion chimique du CO2 en méthanol. Utilisé comme carburant, c’est aussi une excellente molécule-plateforme qui peut donner à elle seule environ 30% de tous les produits chimiques actuellement connus. Liquide à température ambiante et facile à manipuler, il est aussi utilisé pour le stockage d’hydrogène, d'énergie, ainsi que pour les piles à combustible. Dans le cadre du projet européen « Electrons to high value Chemical products » (E2C), l’équipe de l’UCCS élabore des nouveaux nanocatalyseurs bimétalliques pour la synthèse de méthanol à partir du CO2, qui montrent une sélectivité et une stabilité améliorées par rapport aux catalyseurs classiques. Dans un article de revue récemment paru dans Nature Reviews Chemistry, rédigé en collaboration avec le Laboratoire d’electrochimie moléculaire (LEM/CNRS), ils font l’analyse comparative de cette piste très prometteuse de valorisation du principal gaz à effet de serre par le biais de la catalyse hétérogène, homogène, enzymatique, photo- et électrocatalyse.

Rédacteur: AVR

Référence

Highlights and challenges in the selective reduction of carbon dioxide to methanol, Sara Navarro-Jaén, Mirella Virginie, Julien Bonin, Marc Robert, Robert Wojcieszak et Andrei Y. Khodakov, Nature Reviews Chemistry, 24 juin 2021.

https://doi.org/10.1038/s41570-021-00289-y

Contact

Andrei Khodakov
Chercheur, Unité de catalyse et chimie du Solide (CNRS/UNIV ARTOIS/UNIV LILLE/CENTRALE LILLE INSTITUT)
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS