Comment les catalyseurs au cuivre génèrent les liaisons C–CF3

Résultats scientifiques

Les composés organofluorés trouvent de nombreuses applications en pharmacologie et en agrochimie. L’incorporation de groupements CF3 sur des molécules cible est obtenue par trifluorométhylation, une singularité des réactions dites « de couplage croisé ».* Ces dernières sont catalysées par des métaux de transition comme le cuivre, particulièrement prisé car abondant, peu cher en non toxique. En revanche, leurs mécanismes de réaction restent complexes et peu étudiés car ils impliquent des espèces transitoires organocuivre très instables et donc difficiles à caractériser. C’est notamment le cas des fluorures d’organocuivre(III), matériaux inconnus mais couramment proposés comme des intermédiaires clé dans la formation des liaisons C–C, C–F ou C–hétéroatome (N, O).

Les scientifiques du Laboratoire de chimie théorique (CNRS/Sorbonne Université) et du Laboratoire hétérochimie fondamentale et appliquée (CNRS/Université Paul Sabatier) ont montré que pour générer des liaisons C–CF3, la combinaison « catalyseur au Cu/oxydant fluoré » se transformait d’abord en une espèce fluorure de CuIII transitoire qui se décomposait ensuite rapidement pour créer ces liaisons.

Ils ont pour la première fois stabilisé, isolé et authentifié cette espèce transitoire, le fluorure d’organocuivre [PPh4][CuIII(CF3)3F], puis mis en évidence son rôle dans ces réactions de trifluorométhylation. Ils apportent les preuves expérimentales et théoriques de la capacité du CuIII à générer les liaisons C–CF3 par une élimination réductrice.** Ces résultats, publiés dans la revue Angew. Chem. Int. Ed., ouvrent de nouveaux horizons pour la catalyse au cuivre de réactions de couplage croisé à fort potentiel industriel.

(*) Un couplage croisé est une réaction de couplage entre deux fragments moléculaires par formation d'une liaison C–C ou C–hétéroatome avec l’aide d'un catalyseur organométallique.

(**) L’élimination réductrice est une étape élémentaire clé en chimie organométallique impliquant une réduction à 2e d’un métal de transition, générant ainsi une nouvelle liaison C–élément. Ce processus concerté à 2e est typiquement observé pendant la formation des liaisons C–C ou C–hétéroatome dans la catalyse au palladium, mais rarement observé pour la catalyse au cuivre.

Rédacteur : CCdM

Référence

Daniel Joven-Sancho, Andrea Echeverri, Nathalie Saffon-Merceron, Julia Contreras-García, and Noel Nebra
An Organocopper(III) Fluoride Triggering C−CF3 Bond Formation

Angew. Chem. Int. Ed. 2024, e202319412

https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/anie.202319412

 

Contact

Julia Contreras-Garcia
Chercheuse au Laboratoire de chimie théorique
Noel Nebra
Chercheur au Laboratoire hétérochimie fondamentale et appliquée (CNRS / Université Paul Sabatier)
Communication CNRS Chimie