Combiner IA et bases de données de matériaux pour la capture du CO2 dans l’air
Une base de données monumentale de matériaux poreux capables de piéger sélectivement certains gaz (Métal-organic frameworks, ou MOFs) a été actualisée en profondeur grâce à l’intelligence artificielle par une équipe internationale de scientifiques. Combinant extraction automatisée de données, filtrage chimio-informatique et apprentissage automatique, cet outil permet à présent d’identifier facilement des matériaux ultra-efficaces pour capter le CO₂, même en très faible concentration. Une avancée décisive pour identifier des solutions viables de dépollution, parue dans le journal Matter.
Métal-organic frameworks, ou MOFs : ces structures cristallines aussi élégantes que complexes sont devenues des stars de la chimie des matériaux. Constitués de réseaux d’atomes métalliques reliés entre eux par des molécules organiques, les MOFs sont des matériaux ultra poreux capables de piéger sélectivement certains gaz. Depuis deux décennies, la recherche s’emballe, avec plus de 100 000 MOFs synthétisés à ce jour. Mais trouver parmi eux ceux qui pourraient par exemple révolutionner la capture du dioxyde de carbone (CO₂) restait jusqu’ici un défi titanesque.
Une équipe internationale de scientifiques français, américains et sud-coréens vient ici de franchir un cap décisif. En combinant extraction automatisée de données, filtrage chimio-informatique et apprentissage automatique (machine learning), les scientifiques ont actualisé en profondeur la base de données CoRE MOF alimentée depuis 2014. Résultat : plus de 40 000 structures expérimentales nettoyées, triées et enrichies de propriétés prédictives (stabilité thermique, affinité pour l’eau, capacité calorifique, etc.), prêtes pour des simulations à grande échelle.
Mais cette mise à jour va bien au-delà du simple « ménage de printemps ». Grâce à des simulations avancées, notamment en adsorption à température variable (TSA), l’équipe a identifié 34 MOFs surpassant CALF-20, la référence actuelle en matière de capture du CO₂. Certains matériaux sont efficaces même quand le CO₂ ne représente que 1 % du mélange gazeux, concentration que l’on retrouve dans l’air ambiant. L’un d’eux, à base de zinc et de ligands triazolés, combine haute sélectivité et faible affinité pour l’eau, un critère crucial pour l’utilisation en conditions réelles.
Ce travail jette ainsi les bases d’une accélération majeure dans la découverte de matériaux pour la dépollution atmosphérique, notamment pour la captation directe du CO₂ dans l’air (DAC). Mieux encore, la plateforme interactive créée permet à tout chercheur de tester ses propres structures. En conjuguant rigueur expérimentale et puissance de l’IA, cette nouvelle génération de bases de données ouvre la voie à des matériaux conçus sur mesure, bien au-delà de la seule lutte contre le réchauffement climatique.
Rédacteur: AVR
Référence
CoRE MOF DB: A curated experimental metal-organic framework database with machine-learned properties for integrated material-process screening
Guobin Zhao et al.
Matter 2025
https://doi.org/10.1016/j.matt.2025.102140