Un « boost » pour les biopiles

Résultats scientifiques Energie Vivant et santé

Une biopile fournira-t-elle un jour assez d’énergie pour alimenter un pacemaker ? Cette prouesse pourrait devenir possible grâce à des chercheurs français de l’Institut des Sciences Moléculaires (CNRS / Université de Bordeaux / Bordeaux INP Aquitaine) et du Centre de Recherche Paul Pascal (CNRS / Université de Bordeaux) et à une équipe allemande (Université de Stuttgart / Institut Max Planck) qui ont réussi à augmenter le voltage d’une biopile en y insérant un système microélectronique. Cette première démonstration de « chelectronics », alliant chimie et électronique, est publiée dans Nature Communications.

Une biopile fonctionne sur le même principe qu’une pile classique : elle récupère l’énergie libérée par des réactions chimiques. Sa spécificité est de faire réagir, grâce à des enzymes, par exemple l’oxygène et le sucre présents dans le liquide physiologique du corps. Cette réaction génère des électrons, utilisés par la pile pour produire du courant. Présentant l’avantage d’être « propre », la biopile a cependant un défaut : sa tension reste faible et il est impossible de combiner plusieurs biopiles en série pour additionner leurs tensions car immerger des biopiles dans un même fluide provoquerait un court-circuit.

Pour contourner cette contrainte, des chercheurs de l’Université de Bordeaux, du CNRS, de Bordeaux INP, de l’Université de Stuttgart et de l’Institut Max Planck ont intégré à la biopile un système microélectronique qui leur a permis de stocker temporairement les électrons libérés lors de l’oxydation du glucose et d’utiliser leur énergie pour augmenter la tension de la biopile. Ils ont alors pu alimenter une deuxième réaction chimique beaucoup plus énergivore que la première : l’électrolyse de l’eau, produisant ainsi du dihydrogène. Autrement dit, en produisant une molécule à haute valeur ajoutée (le dihydrogène) à partir d’une biomolécule à faible énergie (le glucose), les chercheurs ont engendré une réaction a priori interdite d’un point de vue thermodynamique.

Grâce à ce nouveau concept, les chercheurs envisagent des applications pour ces réactions à l’intérieur du corps humain. La biopile « boostée » pourrait fournir une énergie suffisante pour alimenter des implants médicaux ou synthétiser localement des principes actifs, anti-cancéreux ou anti-inflammatoires, dont l’action serait mieux ciblée, limitant les effets secondaires et diminuant les doses nécessaires.

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©Alexander Kuhn

Référence

Emmanuel Suraniti, Pascal Merzeau, Jérôme Roche, Sébastien Gounel, Andrew G. Mark, Peer Fischer, Nicolas Mano & Alexander Kuhn
Uphill production of dihydrogen by enzymatic oxidation of glucose without an external energy source
Nature CommunicationsAoût 2018

DOI: 10.1038/s41467-018-05704-5

Contact

Alexander Kuhn
Chercheur à l'Institut des sciences moléculaires (CNRS/Université de Bordeaux/Bordeau INP)
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC