Vers l’utilisation d’halogénures dans les batteries Li-ion

Résultats scientifiques

Le stockage électrochimique de l’énergie grâce aux batteries Li-ion est un axe essentiel de la révolution énergétique de notre siècle. Les limitations intrinsèques des matériaux utilisés pour la cathode de ces batteries forment néanmoins un plafond de verre infranchissable pour amener plus loin cette technologie. Une équipe internationale de scientifiques ouvre aujourd’hui une brèche avec une toute nouvelle famille de matériaux : les halogénures lamellaires couplés à des électrolytes superconcentrés. Ces résultats très prometteurs sont à retrouver dans la revue Nature Materials.

Ces dernières décennies, les batteries à ion lithium (Li-ion) se sont imposées comme la technologie phare pour le stockage de l’énergie. Leur fonctionnement repose, notamment, sur l’intercalation d’ions lithium dans des matériaux qui composent les électrodes de la batterie (positive pour la cathode et négative pour l’anode). Cette technologie mature est le résultat de recherches frénétiques débutées dans les années 90 pour trouver des matériaux de cathodes toujours plus performants. Ces recherches ont abouti à la découverte d’oxydes lamellaires ou de matériaux dits polyanioniques utilisés aujourd’hui dans les dispositifs commerciaux. Leurs principaux inconvénients restent l’utilisation de métaux de transition rares, chers et toxiques ainsi qu’une durée de vie limitée, pour les uns, et la faible densité d’énergie pour les autres. Chaque famille a donc ses limitations intrinsèques que seule l’exploration de nouvelles catégories de matériaux permettrait de dépasser.

Parmi les autres familles de composés d’intercalation qui présentent en théorie des caractéristiques prometteuses, les halogénures lamellaires, dont la structure géométrique est similaire à celle des oxydes lamellaires, sont intéressants. Malheureusement, leur solubilité trop importante dans les électrolytes habituellement utilisés dans les batteries Li-ion a, jusque-là, découragé les recherches sur ces matériaux.

Une équipe internationale, menée par un chercheur du laboratoire Chimie du solide et de l’énergie (CNRS/Sorbonne Université/Collège de France) vient de montrer qu’il était possible de dépasser cette limite en couplant l’utilisation d’halogénures lamellaires avec des électrolytes superconcentrés et d’assembler des dispositifs électrochimiques stables. Afin de tester cette nouvelle approche, les scientifiques ont étudié le comportement électrochimique de trois halogénures différents à base de Chlore, Brome et Iode, à savoir VCl3, VBr3 et VI3. Les résultats confirment qu’un ion Li+ par unité peut s’intercaler réversiblement dans ces matériaux. Cette preuve de concept très prometteuse, publiée dans la revue Nature Materials, va permettre d’explorer tout un nouveau pan du tableau périodique pour l’élaboration de matériaux pour le stockage électrochimique de l’énergie et, qui sait, briser le plafond de verre qui repose actuellement sur les batteries Li-ion.

Rédacteur: AVR

Combinés à un électrolyte superconcentré, les halogénures lamellaires ne se dissolvent plus et forment une famille de matériaux prometteurs pour les cathodes des batteries Li-ion © Nicolas Dubouis

Référence

Extending insertion electrochemistry to soluble layered halides with superconcentrated electrolytes Nicolas Dubouis, Thomas Marchandier, Gwenaelle Rousse, Florencia Marchini, François Fauth, Maxim Avdeev, Antonella Iadecola, Benjamin Porcheron, Michael Deschamps, Jean-Marie Tarascon et Alexis Grimaud Nature Materials 29 juillet 2021

https://doi.org/10.1038/s41563-021-01060-w

Contact

Alexis Grimaud
Chercheur, laboratoire Chimie du solide et de l’énergie (CNRS/Sorbonne Université/Collège de France)
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS