Injection d’une réaction chimique dans la cavité optique - © Moran & Ebbesen

Une sélectivité chimique par couplage vibrationnel

Résultats scientifiques Molécules Instruments et analyse

Favoriser une réaction à partir d’un matériel comportant plusieurs groupes fonctionnels différents représente un challenge important pour les chimistes. Des chercheurs de l’Institut des sciences et d’ingénierie supramoléculaires (ISIS, CNRS/Université de Strasbourg) y sont parvenus grâce au couplage fort vibrationnel, un phénomène qu’ils ont eux-mêmes découvert. Publiés dans la revue Science, ces travaux s’appuient sur la manipulation de miroirs micrométriques.

Partout dans l’Univers et dans notre environnement, le niveau d’énergie de chaque point de l’espace subit des variations : on parle de fluctuations électromagnétiques ou de fluctuations quantiques. Des chercheurs de l’Institut de sciences d’ingénierie supramoléculaires (ISIS, CNRS/Université de Strasbourg) utilisent ce phénomène pour plusieurs applications, la plus récente étant la sélectivité réactionnelle : favoriser une seule réaction chimique là où plusieurs pourraient se produire. Les chercheurs confinent pour cela les fluctuations électromagnétiques dans une cavité optique, formée de deux miroirs distants de quelques micromètres, afin de les mettre en résonnance avec les vibrations de certaines liaisons des molécules. On parle alors de couplage fort vibrationnel (VSC).

 Les scientifiques ont déposé dans la cavité optique un substrat comportant deux groupements silyles distincts : un lié à un atome d’oxygène et l’autre à un atome de carbone. Normalement, deux nouvelles molécules se forment en quantité équivalente au contact d’un ion fluorure, mais les chercheurs sont parvenus à choisir celle qui doit apparaître en majorité en modulant le VSC, via l’espacement des miroirs. Tout cela s’opère dans le noir, c’est-à-dire sans apport d’énergie par la lumière. Ces travaux ouvrent de nombreuses perspectives pour la synthèse sélective de molécules. Cela pourrait déboucher également sur un procédé plus vert. Les chercheurs continuent d’explorer les effets surprenants du VSC, et espèrent en particulier augmenter la vitesse des réactions chimiques.

Référence

A. Thomas, L. Lethuillier-Karl, K. Nagarajan, R. M. A. Vergauwe, J. George, T. Chervy, A. Shalabney, E. Devaux, C. Genet, J. Moran, T. W. Ebbesen

Tilting a ground-state reactivity landscape by vibrational strong coupling

Science - Février 2019

DOI: 10.1126/science.aau7742

Contact

Joseph Moran
Chercheur (ISIS UMR7006)
Thomas Ebbesen
Chercheur (UMR7006 ISIS)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Sophie Félix
Chargée de communication