Vers une production d’amines éco-efficiente

Résultats scientifiques Catalyse Environnement

Les amines sont des composés clés pour l’industrie chimique. Leur préparation à partir d’alcools biosourcés est une alternative plus respectueuse de l’environnement que les voies de synthèse actuelles, mais elle se heurte à des problèmes de sélectivité. Des chercheurs de laboratoires du CNRS, leurs collègues belges et américains ainsi que leur partenaire industriel, la société Solvay, ont identifié les facteurs clés gouvernant l’activité et la sélectivité de catalyseurs métalliques participant à cette réaction. Ces travaux, publiés dans la revue Nature Catalysis, permettront une meilleure sélectivité et un usage industriel plus large à cette réaction de synthèse verte.

L’amination des alcools est une voie séduisante pour la production d’amines, ces composés azotés utilisés par exemple en industries pharmaceutiques, agrochimiques ou des colorants. En faisant réagir des alcools biosourcés avec l’ammoniac en présence d’un catalyseur métallique ciblé, cette réaction produit simultanément une variété d’amines, ainsi que des nitriles (autres composés à base d’azote). Cependant, seules les amines primaires, où deux atomes d’hydrogène sont liés à l’atome d’azote, ont un intérêt industriel. Trouver un catalyseur à la fois actif, stable et sélectif en amine primaire est donc un défi qui reste à relever. Chose faite par un consortium international de scientifiques du Laboratoire de chimie (ENS Lyon/CNRS/Université Claude-Bernard), du laboratoire E2P2L (CNRS/Solvay), de l’Unité de catalyse et chimie du solide (CNRS/ENSC Lille/Centrale Lille/Université d’Artois/Université de Lille) et des universités de Ghent (Belgique) et de Californie Los Angeles (USA).

L’utilisation d’outils de chimie quantique a permis d’identifier les intermédiaires réactionnels à l’origine de la perte de sélectivité en amine primaire. Les chimistes ont aussi montré que la capacité des atomes d’oxygène et de carbone à se fixer au catalyseur (leur énergie d’adsorption) était une clé pour contrôler l’activité du catalyseur et sa sélectivité. Grâce à l’apprentissage automatique, une branche de l’intelligence artificielle, ils ont ainsi pu mettre en place une carte prédictive : celle-ci permet de déterminer, parmi plusieurs centaines de combinaisons possibles de deux métaux lesquelles seraient les plus intéressantes en termes d’activité et de sélectivité. Et parmi celles-ci, deux ont pu être confirmées expérimentalement: un mélange de cobalt dopé avec un peu d’argent ou de ruthénium. Ces combinaisons devraient permettre d’améliorer la sélectivité et donc l’attrait industriel des réactions d’amination des alcools.

Référence
Tao Wang, Javier Ibañez, Kang Wang, Lin Fang, Maarten Sabbe, Carine Michel, Sébastien Paul, Marc Pera-Titus, Philippe Sautet
Rational design of selective metal catalysts for alcohol amination with ammonia
Nature CatalysisAoût 2019

DOI: 10.1038/s41929-019-0327-2

Contact

Philippe Sautet
IMASC Energy Frontier Research Center - USA
Carine Michel
Laboratoire de chimie - ENS Lyon
Pera-Titus Marc
Eco-Efficient Products and Process Laboratory – UMI3464 CNRS/Solvay China
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Sophie Félix
Chargée de communication
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC