Purifier l’eau grâce à des nanofeuilles hydrophobes
Vues macroscopique et microscopique d’une membrane à base des feuillets de MoS2 hydrophobes. © Damien Voiry

Purifier l’eau grâce à des nanofeuilles hydrophobes

Résultats scientifiques Matériaux Environnement

Couches extrêmement fines, les nanofeuilles 2D suscitent l’intérêt des scientifiques, notamment pour la purification de l’eau par filtration. Alors que les matériaux actuels gonflent trop souvent dans l’eau, des chercheurs du CNRS, de Sorbonne Université et de l’université de Montpellier ont modifié chimiquement des nanofeuilles de disulfure de molybdène (MoS2) afin de les rendre hydrophobes. Ces travaux, publiés dans Nature Materials, montrent en plus que ce matériau peut filtrer environ 90 % des polluants, micropolluants et du sel de l’eau.

Les matériaux 2D sont intensivement étudiés pour la filtration des espèces chimiques. Ils se présentent alors sous forme de membranes constituées de couches de matériaux de seulement quelques atomes d’épaisseur. Les oxydes de graphène se montrent particulièrement efficaces, mais ils gonflent dans l’eau et se dégradent. Comme alternative, des chercheurs du CNRS, de la Sorbonne et de l’université de Montpellier proposent d’utiliser des nanofeuillets de disulfure de molybdène (MoS2) dont ils ont modifié la chimie de surface. Le MoS2, naturellement lamellaire, est ainsi exfolié sous forme de nanofeuilles de trois atomes d’épaisseur, soit 0,6 nanomètre, ensuite réempilées sous forme de membrane. La distance entre les nanofeuilles superposées forme des pores qui filtrent les molécules ou les sels contaminant l’eau. Les chercheurs ont ensuite ajouté des groupements méthyles, hydrophobes, à la surface des couches de MoS2. L’eau interagit ainsi moins avec le matériau, ce qui limite sa dégradation et accélère la filtration. Les contaminants, plus gros que les molécules d’eau, sont en revanche bloqués. Environ 90 % des micropolluants (hormones, principes actifs de médicament, etc.) et du sel de l’eau sont alors éliminés, alors que l’accès à l’eau potable est un problème sanitaire et géopolitique. Ces résultats montrent également l’importance du contrôle de la chimie de surface et de l’espacement des couches pour améliorer les performances des membranes de filtration.

Ces travaux rassemblent des chercheurs de l’Institut européen des membranes (IEM, CNRS/Université Montpellier/ENSCM), du Laboratoire Charles Coulomb (L2C, CNRS/Université de Montpellier), de l’Institut des matériaux de Paris Centre (IMPC, CNRS/Sorbonne Université/ESPCI Paris) et du Laboratoire de chimie de la matière condensée de Paris (LCMCP, CNRS/Sorbonne Université).

Purifier l’eau grâce à des nanofeuilles hydrophobes
Vues macroscopique et microscopique d’une membrane à base des feuillets de MoS2 hydrophobes. © Damien Voiry.

 

 

Référence

Lucie Ries, Eddy Petit, Thierry Michel, Cristina Coelho Diogo, Christel Gervais, Chrystelle Salameh, Mikhael Bechelany,Sébastien Balme, Philippe Miele, Nicolas Onofrio, Damien Voiry
Enhanced sieving from exfoliated MoS2 membranes via covalent functionalization
Nature Materials — 26 août 2019

DOI: 10.1038/s41563-019-0464-7

 

Contact

Damien Voiry
Chercheur à l’Institut européen des membranes (CNRS/Université de Montpellier/ENSCM)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Sophie Félix
Chargée de communication
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC